jamais toute pensée émet
Paru au seuil du ⅩⅩe siècle, Un coup de dés jamais n'abolira le hasard de Stéphane Mallarmé est le POÈME par excellence. Ecrit dans une langue abrupte et splendide, syncopé comme on le dirait d'un morceau de jazz, le poème est aussi conçu visuellement, avec ses lignes distribuées sur des doubles pages et son jeu typographique. Il est, enfin, énigmatique.
Un naufrage se dénoue. Un Maître tient dans son poing fermé des dés, deux probablement, qu'il hésite à lancer. L'aigrette (une plume) qui coiffait sa toque témoignera bientôt seule du drame, quoique fugacement car elle est happée par un tourbillon. Du tourbillon surgit brièvement une sirène, la proue du navire? Le lancer a-t-il eu lieu? Nulle certitude mais oui, peut-être, sous la forme céleste d'une constellation dont les étoiles sur fond de ciel nocturne s'identifieraient aux points des dés.
UN COUP DE DÉS |
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Un coup de dé jamais n'abolira le hasard, extraits | Le Christ dans la tempête sur la mer de Galilée, détail |
(Stéphane Mallarmé, 1897 et 1914) | (Rembrandt, 1632) |
Le poème pose une énigme littéraire qui s'articule autour de cet unique
Nombre qui ne peut pas être un autre
. Avec ses mots dés
,
hasard
, probabilité
, événement
, peut-être
, avec
l'expression compte total en formation
, il invite à une lecture
probabiliste. Selon la magnifique expression de Quentin Meillassoux, Un coup
de dé jamais n'abolira le hasard est en fait un poème tremblé
(la
qualification sonne lumineusenent aux oreilles du probabiliste) qui recèle en
son sein un procédé de cryptage élucidé par celui-ci.